Donner une nouvelle vie aux composites vieillis !

Publié par Mohammad Jawad Berro, le 19 septembre 2025   66

Vous savez ce qu’on dit toujours à propos de reformer l’avenir... Je pense que c’est enfin possible !

Je m’appelle Jawad, je suis doctorant et membre d’un groupe de chercheurs à l’Icam Ouest, site de Nantes. Mon travail a justement un rapport avec ce sujet. Au cours des trois dernières années, j’ai travaillé sur un projet cofinancé par la région Pays de la Loire et l’Union européenne visant à développer une méthode originale de recyclage de certains matériaux. Nous aimons les appeler « composites polyester renforcés de fibres de verre ».

Désolé pour tous les termes techniques, je me suis peut-être un peu laissé emporter !

Voici en quelques mots de quoi il s’agit. Au cours des dernières décennies, certains matériaux intéressants ont fait beaucoup parler d’eux. Ils ont remplacé les matériaux auxquels nous étions habitués, puis ont été utilisés dans la fabrication de tout et n’importe quoi : avions, voitures, bateaux, équipements sportifs, pales d’éoliennes, etc. Ces matériaux sont appelés composites, tout simplement parce qu’ils sont constitués d’au moins deux matériaux différents. Ils sont le plus souvent composés d’un liant et d’un renfort. Il est intéressant de noter que certaines recettes magiques de composites permettent d’obtenir des matériaux dix fois plus résistants que l’acier, tout en étant cinq fois plus légers. Je dirais que c’est une bonne affaire ! C’est pourquoi le marché mondial des composites devrait atteindre 160 milliards de dollars en 2027 !

Cependant, cette prospérité s’accompagne d’une quantité importante de déchets issus de la production de composites, de pièces défectueuses ou de chutes. Les pauvres. Il existe également ce que l’on appelle les pièces composites « en fin de vie » ou « fdv ». Il s’agit de composites qui ont bien rempli leur fonction pendant de nombreuses années et qui sont désormais prêts à prendre leur retraite et à profiter d’une tasse de thé bien chaude. En 2050, 43 millions de tonnes de pales d’éoliennes seront mises hors service. Eh bien, cela fera beaucoup de thé !

Il est clair que le recyclage des composites n’est pas seulement une question de « suivre la tendance ». C’est une nécessité pour un avenir meilleur. Les technologies dont nous disposons aujourd’hui permettent dans une certaine mesure de traiter les déchets. Les thermoplastiques utilisés dans la fabrication des composites peuvent être fondus et retravaillés. Vous pouvez consulter les travaux de ma collègue E. Farah sur le recyclage du polypropylène avec caractérisation active en ligne dans le cadre du projet RECYPLAST-DEMO. Vous pouvez également consulter son article quelque part sur Echosciences !

Un autre type de composites, qui est le plus utilisé, est moins coopératif, car le liant est un thermodurcissable. Je sais, ce n’est pas le nom le plus attrayant. Recycler ou séparer ce type de combinaison n’est donc pas une mince affaire ! Nous devons donc nous appuyer sur des techniques qui peuvent sembler un peu extrêmes. Le recyclage mécanique, par exemple, consiste à utiliser un broyeur pour réduire les grandes pièces composites en petits morceaux de quelques centimètres de long. Une grande partie des propriétés autrefois remarquables serait perdue. Le recyclage chimique consiste à utiliser des solvants puissants capables de décomposer le liant et de libérer les renforts. Cette méthode est assez coûteuse et les solvants présentent un risque important pour les opérateurs. Le recyclage thermique consiste à chauffer le composite à des températures extrêmement élevées pour évaporer le liant, voire à brûler l’ensemble et à récupérer l’énergie thermique. Ce n’est pas vraiment une méthode efficace d’exploitation de l’énergie !

C’est vraiment dommage que ce soit tout ce que nous ayons ! Ou peut-être pas ?

Vous voyez, notre objectif est de proposer une autre voie de recyclage, une méthode capable d’atténuer tous les problèmes des solutions conventionnelles. Et j’ai la chance d’avoir travaillé suffisamment dur pour la mettre en place au cours des trois dernières années. Ma thèse fait partie du projet européen RECREATE. Mais ce n’est pas seulement un acronyme fantaisiste. Il s’agit d’un projet à grande échelle impliquant 21 institutions de 9 pays européens qui se réunissent pour améliorer l’économie circulaire des matériaux composites. Le concept de base de notre méthode consiste à essayer de reformer les pièces composites à l’aide de pression et de température sans compromettre leurs propriétés mécaniques. Les morceaux de déchets provenant d’une coque de bateau ou d’une pale d’éolienne en fin de vie présentent une légère courbure due à leur conception. Les aplatir nous permettrait d’obtenir des matériaux pratiques pour la fabrication de panneaux techniques destinés aux véhicules de transport public. On peut dire que cela fait d’une pierre deux coups ! La réalisation de cet objectif dépend de tests mécaniques spéciaux visant à définir nos limites opérationnelles. Les résultats recueillis influencent directement le développement d’un prototype préindustriel capable d’aplanir les composites courbés. La bonne nouvelle ? La machine est prête et elle fonctionne !

N’est-ce pas là une façon de reformer l’avenir ?