Les mutations du droit face à l'écocentrisme
Le 8 octobre 2025, le Centre Jean Bodin organise la 6ème édition du colloque biennal des doctorants du CJB.
Le colloque se tiendra de 8h30 à 17h à la Faculté de droit, d'économie et de gestion de l'Université d'Angers, en amphithéâtre Lagon (3ème étage). Cette édition portera sur "Les mutations du droit face à l'écocentrisme". Elle est organisée par Saba Alqabelat, Zakaria Arab et Meriem Sakli, sous la direction scientifique de Catherine Deffains-Crapsky, Bernard Gauriau, Félicien Lemaire, Solène Ringler et Matthieu Zolomian.
Présentation
Pendant des siècles, l’Homme vivait dans l’illusion d’être au centre de l’univers, s’estimant la seule entité digne de protection et d’attention. Cette perception imprégnait également le droit, structuré autour d’une approche anthropocentrique. Cependant, trois grandes révolutions scientifiques ont profondément ébranlé cette vision. La révolution copernicienne l’a obligé à renoncer à sa position centrale dans l’univers, la révolution darwinienne à reconnaître son appartenance au règne animal, et la révolution freudienne à accepter l’influence de son inconscient sur ses actions.
Ces
ruptures ont conduit l’Homme à reconsidérer son rôle dans le monde et à
s’intéresser davantage à la protection des êtres vivants. Une approche
biocentrique a ainsi vu le jour, privilégiant la préservation de la
biodiversité et la sauvegarde des espèces en voie d’extinction.
Toutefois, malgré ces avancées, cette vision reste incomplète, laissant
subsister une séparation entre l’Homme et la nature. Cette évolution de
la pensée culmine avec l’écocentrisme, qui élargit la perspective
au-delà de ces deux approches : l’humanité constitue un élément parmi
d’autres dans un système où tout, vivant ou non, est fondamental.
L’écocentrisme,
tirant son origine des termes grecs οἶκος (« maison ») et κέντρον («
centre »), propose une nouvelle approche juridique marquant une rupture
avec la tradition occidentale anthropocentrique. Cette conception met
l’accent sur l’écosystème dans son ensemble, considéré comme une unité
fondamentale.
Néanmoins, ce
paradigme novateur soulève plusieurs questions juridiques majeures. La
première concerne la redéfinition des sujets de droit et la
reconnaissance juridique des écosystèmes. La deuxième porte sur la
réorganisation des droits et obligations, notamment la représentation
juridique des entités non humaines. Enfin, la troisième interroge les
instruments juridiques nécessaires pour garantir une protection
effective des écosystèmes. Ces défis montrent l’urgence d’un dialogue
approfondi pour accompagner les mutations juridiques que cette approche
pourrait engendrer.
L’intégration
des approches écocentriques transforme progressivement l’approche
juridique contemporaine en accordant une importance primordiale à la
protection de l’environnement. Dans le domaine du droit privé, une
innovation significative émerge, où les écosystèmes acquièrent une
protection juridique autonome, indépendamment des considérations
anthropocentriques. L’évolution du droit pénal reflète désormais la
criminalisation des atteintes environnementales per se, tandis que le
droit public intègre la protection environnementale comme composante
essentielle des droits fondamentaux. Cette progression juridique se
manifeste concrètement dans les instruments internationaux, notamment
les Conventions de Genève de 1977 concernant la protection
environnementale en période de conflit, ainsi que dans la jurisprudence
récente, illustrée par l’affaire Lhaka Honhat (2020) établissant la
corrélation entre droits autochtones et préservation environnementale.
Programme
L’écocentrisme, qui repose sur une vision intégrant l’humain comme partie intégrante des écosystèmes, constitue un défi pour les régimes juridiques centrés sur l’anthropocentrisme. Ce colloque propose d’approfondir cette problématique à travers trois axes principaux :
- Les fondements théoriques
- Les applications pratiques et études de cas
- Les perspectives d'évolution
Ces axes seront suivis d'un atelier. L'atelier permettra de synthétiser les apports essentiels de la journée et de tracer les perspectives pour ancrer l'écocentrisme dans notre système juridique. Les participants échangeront sur les enseignements clés, les questions qui restent ouvertes, et les stratégies concrètes pour transformer notre approche du droit. Un espace de dialogue pour construire collectivement les prochaines étapes de cette mutation juridique et identifier les axes de recherche prioritaires.
Modalités d'inscription
Pour des raisons logistiques, l'inscription (gratuite) est obligatoire.